Sésames des soleils, 3 - L'astre qui voulait murmurer

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Pour qu'une pluie d'atropine
perce vos yeux de déments
moi je suis nu pour qu'on soit quitte
je suis devenu corbeau blanc

-Julien Doré :





Sésames des soleils.

3- L'astre qui voulait murmurer


Elle est entrée dans l'eau
cherchant son cap
elle a chauffé la mer*

puis l'astre qui vacillait en souriant
a eu envie de froid
de couleurs douces et mouillées
elle a eu envie de s'éveiller le lendemain matin
la tête légère
un corps neuf
un autre pays

oublier peut-être et quitter
oui
elle ne savait pas quitter
elle revenait sans cesse
et toujours ce maintien pour marcher au milieu de tous
sereine la tête droite le regard aimant
la carapace de tortue suspendue à son côté
la noblesse de son pied de fille arqué
sous lequel
s'il choisissait le bon moment
un petit animal pouvait passer

la courbe de ses paumes qui versaient la chaleur à la perfection
cette harmonie douloureuse avec laquelle elle voulait rompre

quitter
ouvrir la main laisser tomber la fleur que l'on tient
quitter
les deux pieds s'écartent l'un de l'autre
les jambes le ventre jusqu'au visage
tout s'ouvre en deux
 
elle s'était arrêtée dans une de ces îles du nord
où pensait-elle
la lumière sait chuchoter
adossée à un pommier elle parlait
elle haranguait la foule en murmurant

   le ciel est lourd
   les ailes
   ne croyez pas ce qu'on vous raconte
   les ailes
   entrent dans le corps
   le ciel est cru
   saigne par son flanc
   et tombe brusquement

   les auréoles sont la colère des comètes
   qui se font mal en tombant
   parce qu'un humain a entendu parler de leur venue
   et croit bon de lisser le sol

   vous ne comprenez donc pas
   que c'est lorsque nous n'avons pas mal que nous avons mal ?
   le ciel
   c'est cela aussi vous savez

   toujours
   partout
   une lèvre cherche l'autre

alors ils posaient une échelle contre le pommier
pour la remonter
l'accrocher à la plus haute branche
ils voulaient qu'on la voie de loin
ils voulaient que sa lumière guide les navires jusqu'au grand large

fais-nous une catastrophe
brûle l'océan brise les montagnes et fais gronder les grottes
écrase-nous sur le sol

mais elle
elle avait voyagé pour connaître les centimètres
les gouttes
les murmures
les brins
les caresses à peine esquissées

et
accrochée malgré elle au sommet de l'arbre
la comète qui s'était baissée pour embrasser la Terre
et poser sa joue contre une joue d'homme
suppliait qu'on la descende et qu'on lui donne enfin son carré de terre
son potager dans lequel elle pourrait faire pousser
une
une et une seule petite fleur




* cf Le jardin que ma fleur cherchait<=== Audible <=== L'évasion aux clefs de lune <===*vous êtes ici* ===> Onzième corps de la chouette ===> Premier chant de la comète

Dernière modification le mercredi 28 Février 2018 à 16:43:16
Remercie pour la lumière du jour
pour ta vie et ta force
-Tecumseh, chef Shawnee


*
Avatar : Déesse Epona, bois de chêne, alliage cuivreux, tôle d'argent et pâte de verre, Ier-IIème siècle, Saint Valérien, Bourgogne (actuelle Yonne)
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