... Pas moins printemps - 4. Presque à toucher la presque pleine lune

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Nous nous contemplâmes, rien qu'un instant-étincelle, libérés
- Aurora de Albornoz, poétesse espagnole

Yellow Moon, Catbird  :




.. Pas moins printemps.
4. Presque à toucher la presque pleine lune


Je n'ai fait que quelques pas vers la presque pleine lune
mon jardin est en pente et j'aurais pu tomber tout en te parlant
alors je me suis penché avec lui
dans le même sens
comme pour négocier un virage sur un bolide
alors que je marchais doucement

pour la lune
ça ne changeait rien

j'ai oublié la plupart des étoiles depuis longtemps
j'avance un doigt comme pour le tremper dans le ciel
il est un peu froid il me reproche de ne plus le connaître
même sur la route minuscule trônent des éclairages puissants
couronnés d'insectes qui semblent les transformer en spectres venus se venger

et la vengeance est complète puisque je ne vois plus les étoiles

toi tu es là comme tu l'es toujours
tu sais
je trouve que l'infini s'éloigne de plus en plus de moi
parfois
pour deviner que tout cela existe bel et bien
je colle mon oreille sur ton oreille
et dans cette conque un peu ouverte
j'entends la musique de ce qu'on ne voit plus

oui maintenant j'entends tout
dans le jardin il y a quand même des lumières
maintenant qu'elles ne sont plus au ciel
elles vivent à notre hauteur
pour le savoir il faut sortir un soir d'été
sur un coup de tête sans l'avoir planifié sans le savoir à la seconde d'avant
il faut jaillir de sa maison

elles sont tout un peuple
elles sont noires comme des trous débordants
ou bien vertes presque noires comme un printemps qui ne sait pas s'arrêter
et qui n'en peut plus

elles sont pourpres comme des étincelles au creux d'une chair
qui les entoure et peine à les dissimuler
qui les chérit mais désire qu'elles sortent d'elle en grappe 

et cette fois je roule sur la pente en riant
mon corps allongé resterait bien là toute la nuit
visage touchant une large feuille
t'écrivant avec des baisers au creux de sa courbe
répondant à ce qui m'a fait sortir alors que je m'apprêtais à rentrer
peut-être pour toujours

que mon corps soit droit ou renversé
pour la lune ça ne change rien

regarde
le magnolia s'apprête à fleurir
et j'aimerais qu'une de ses fleurs s'ouvre en une nuit autour de nos visages
une fois le soleil levé
on ne verrait plus qu'une seule fleur qui sourit et dort encore
et tu n'aurais plus mal
plus jamais

toutes ces lumières vivent maintenant à notre hauteur
et elles brillent quand même

je voudrais toutes les verser dans ton ventre qui souffre

quelques petits pas de plus
et ces lumières deviendraient denses
flots entre nos mains
matières qui se préciseraient un peu plus l'une pour l'autre
se chercheraient se joindraient
un peu de toi
un peu de moi

pour la presque pleine lune ça ne changerait rien
de presque la toucher

















Dernière modification le mercredi 27 Juin 2018 à 09:48:07
Remercie pour la lumière du jour
pour ta vie et ta force
-Tecumseh, chef Shawnee


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Avatar : Déesse Epona, bois de chêne, alliage cuivreux, tôle d'argent et pâte de verre, Ier-IIème siècle, Saint Valérien, Bourgogne (actuelle Yonne)
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