Mahatma Bandit

Ha, enfin on connaît son prénom...
Superbe.
Et somptueux, ton livre sur le site, Lise, ça nous donne une autre dimension, merci.

et le coffre n'est toujours pas ouvert, c'est une vraie bombe qu'il doit y avoir là-dedans

0 appréciations
Hors-ligne
Roger allait partir pour la Rochelle dans trois jours. Il a averti Aliénor, qui s?est sentie désemparée. Tout à coup, elle ne pouvait plus ouvrir un livre, sortir dans le jardin et héler par-dessus le mur Théo qui l?attendait. Et pourtant sa mère, elle voulait la retrouver ! Mais ici, elle commençait à se sentir en confiance, acceptée, elle vivait des moments de paix, simples comme les herbes du potager.

Dorothée l?a bien senti, ce bouleversement d?Aliénor. Alors elle a parlé à Roger : « Et si on l?ouvrait ce coffre ? un peu comme un don qui lui serait fait, comme pour lui dire qu?elle fait partie des nôtres, qu?elle peut revenir quand elle veut?»
Roger s?est retourné toute la nuit dans son lit. Ce coffre, il avait envie de l?ouvrir, mais aussi de le garder secret. Après ce serait comme une fleur que l?on cueille et qui se fane, un livre qui se termine mais trop tôt, il y aurait tant de pages encore à découvrir. Mais oui, bien sûr, il y avait Aliénor, et il pressentait qu?elle était la clef d?un univers inconnu.

Le lendemain, il en a parlé au père de Théo, avec qui il conversait souvent.. Dans son regard, il y avait une telle acuité et aussi une générosité qui l?impressionnaient. C?était un homme d?une grande écoute On n?appelle pas son fils Théo pour rien. Cet homme là était différent.
Après, il est rentré chez lui et a dit à Dorothée et Aliénor : « Demain, nous allons ouvrir le coffre ». Puis sans un mot de plus, il a quitté la pièce.


Derni?re modification le 16-04-2009 ? 19:06:37

0 appréciations
Hors-ligne

Je l'ouvrirais bien, ce coffre, mais tant d'autres en ont envie!

Héhéhé, le suspens continue ! Décidément, cela devient insoutenable, il n'y a plus de raison de ne pas l'ouvrir, ce coffre!


Avez-vous tous été voir la belle mise en page de notre oeuvre collective par Lise?

[lien]

0 appréciations
Hors-ligne
Ah oui!, j'en reste baba. Comment réunir ces textes si vite et si bien? Au fond, je crois qu'on m'a mise au monde pour admirer les autres! Et ici, ce n'est pas difficile! Comme pour ton texte précédant le mien, Flo!

Derni?re modification le 16-04-2009 ? 21:04:08
Mahatma Bandit

Maintenant, nous n'allons pas ouvrir le coffre, ni savoir ce qu'il y a exactement dedans. Mais on va en savoir beaucoup plus et connaître au moins la nature et la provenance de ce qu'il contient...

**********

31 mars 1977, La Rochefoucauld, Charente.

Malgré son grand âge, Soeur Marie-Gabrielle se lève vivement pour saluer l'homme qui vient d'entrer. Son visage reste dans l'ombre. Elle se dit qu'il doit en être de même, vu de son côté à lui.
Deux silhouettes se dévisagent sans se distinguer, comme deux bonhommes de chaque côté d'une feuille de dessin d'enfant. Ni l'un ni l'autre n'ont besoin d'en voir plus pour se reconnaître.
Soeur Marie-Gabrielle tente de se composer une attitude, puis y renonce rapidement. Son coeur est comme fou. Il le sait très bien, puisqu'il est lui aussi au bord de l'évanouissement.
Elle le détaille. Après tout, en trente-deux ans, il n'a pas plus changé qu'elle.
L'homme fait le geste d'enlever son chapeau pour la saluer, puis il s'aperçoit qu'il l'avait déjà enlevé. Il dit, très gravement :
- Ma soeur...

Elle est bouleversée d'entendre ce mot prononcé avec tant de respect dans la bouche de ce vieux communiste. Ça, c'est nouveau. Cette gravité. Lui qui était si léger, qui avait toujours l'air de tenir un accordéon d'une main et un verre de l'autre . Peut-être qu'il a prié à sa façon, pendant toutes ces années. Ou peut-être tout simplement que c'est la première fois de sa vie qu'il dit "ma soeur".
Il lui avait demandé une fois au maquis Foch, s'il était possible de prier sans Dieu. Elle était encore dans le monde à l'époque et elle l'avait assuré que non. Maintenant, avec les couches de foi accumulées, avec ses levers avant l'aube, elle n'en est plus si sûre.
Elle secoue la tête pour chasser la vague de nostalgie et demande.
- Tu t'es converti ?
- Jamais de la vie !
C'est tout juste s'il ne crache pas par terre. La vieille religieuse préfère ça, qu'il soit resté tel quel. Elle ne sait pas pourquoi mais elle sent que Dieu aussi, préfère ça.
- Alors, appelle moi comme avant. Toi, tu peux. Toi, tu dois...
- Bonjour, Aurore Fontanille. Bonjour Crépuscule.

Sous l'émotion, Soeur Marie-Gabrielle se lève. Elle a besoin de faire les cent pas. Elle a besoin de bouger son vieux corps. Si elle reste immobile, elle va tomber en pièces. Se faire appeler par son vrai nom, puis par son surnom de résistante pour la première fois depuis très longtemps, ça vous défait une attitude en quelques secondes.
- C'est mieux. Bonjour Max Bronstein. Bonjour Galipette.Excuse-moi, je dois avoir l'air bête, les visites sont très rares. Et la tienne est... enfin, ce n'est pas n'importe quelle visite. C'est la divine providence qui t'amène...
- Ou la volonté des peuples.
- Mais qui leur insuffle cette volonté, je te le demande, qui ?
Ils rient de plus belle tous les deux. Ils recommencent leur jeu exactement pareil, comme s'ils étaient toujours en 42.
Max lève la main pour signifier qu'il va dire quelque chose sans blaguer. Soeur Marie-Gabrielle est saisie. C'est exactement le même geste qu'il avait à l'époque. Et en plus, elle remarque que ses mains n'ont pas vieilli du tout.
- Je reviens de Jaffa...
Pendant un instant, soeur Marie-Gabrielle pense que c'est un nom de code de l'époque des maquis. Puis elle se souvient des oranges de Jaffa. Enfin, dans un troisième temps, elle se souvient du pays où elles poussent.
- Tu es allé...là-bas ? Tu es allé voir qui ?

Cette fois, elle s'assied lourdement. Des visages défilent à toutes vitesse devant ses yeux. Très nombreux. Leur pays et leur maquis se trouvait juste à cheval sur la ligne de démarcation. Ça défilait. Qui ?
- Marinette Frondeau. Enfin, disons plutôt Sarah Epelbaum.
Il a prononcé le nom avec l'accent tonique yiddish, sans doute exprès.
Soeur Marie-Gabrielle la revoit tout de suite. Et elle entend "L'accordéoniste" dans sa tête. Sarah était une jeune fille parisienne qui faisait tout comme Edith Piaf, elle voulait lui ressembler, s'habiller comme elle, parler comme elle, chanter comme elle, boire comme elle. Comme elle avait des connaissances en couture, elle était allé au culot voir son idole, et comme Piaf protégeait tous les juifs qu'elle pouvait, elle l'avait bombardée sa "seconde styliste", lui avait fait faire des faux papiers au nom de Marinette Frondeau et l'avait faite filer dès que possible vers la ligne de démarcation. Sarah était restée deux mois en Charente. Elle chantait tout le temps. Elle était venue en portant un petit coffre en cuir, qu'elle avait été obligée de laisser sur place, parce que son passage de la ligne avait été fortement précipité par une dénonciation.
- Quel âge a Sarah, maintenant ?
- Cinquante-sept ans. Elle a vécu quelques années aux Etats-Unis, où elle a revu sa chère Piaf en 47 pendant sa tournée, puis l'année d'après, dès que l'état d'Israël a été créé, elle est partie là-bas. Elle a cinq enfants et déjà autant de petit enfants. Elle m'a demandé de tes nouvelles. Je n'ai pas trop quoi su lui dire...
- Tu ne lui as pas dit que j'étais avec Dieu ?
- Si.
- Alors, tu lui as tout dit.
- Elle m'a aussi demandé quelque chose...

Soeur Marie-Gabrielle hoche la tête. Aurore aussi. Crépuscule aussi. La trinité de ses identités murmure d'une seule bouche :
- C'est à propos du coffre, bien sûr.
- Bien sûr.
- Que veut-elle qu'on en fasse ?
Aurore n'avait jamais demandé à Sarah ce qu'il y avait dedans. Elle ne voulait pas, parce qu'on volait déjà tout aux siens. Ce coffre, c'était son territoire. Sa terre promise qu'elle transportait. Elle ne l'avait même jamais ouvert depuis. Il était simplement là, dans sa cellule. Elle aimait beaucoup sa compagnie.
Max lui répond.
- Sarah souhaite qu'on l'enterre. Mais surtout qu'on ne le détruise pas. D'après ce que j'ai compris, ce qu'il y a dans ce coffre pourrait valoir des millions de francs.
- Des millions ?
- Piaf, un soir de cuite, avait jeté plein de choses. Elle disait que ça ne valait rien, que c'était bon à mettre à la poubelle. Alors, bien sûr, Sarah avait méticuleusement tout ramassé et tout mis dans ce coffre. Je ne sais pas exactement ce que c'est. Elle avait voulu tout rendre à Piaf le lendemain, mais Piaf lui avait rétorqué que tout ce qu'elle avait pu trouver était désormais à Sarah. Alors, Sarah avait embarqué le coffre dans sa fuite.
- Pourquoi elle veut qu'on l'enterre maintenant ?
- Parce qu'elle dit qu'il est encore trop tôt pour l'ouvrir. Que quelqu'un le trouvera un jour. Que Piaf se mérite. C'est toujours son idole, tu sais... Je crois qu'elle veut être morte le jour où quelqu'un trouvera le coffre.

Deux vieilles silhouettes alertes. Deux chats qui sautent de fourré en fourré comme dans le temps. Une des silhouettes porte une pelle. Soeur Marie Gabrielle se répète avec délices, comme pendant les nuits clandestines d'antan, la phrase "le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit". L'autre porte un coffre. Il imagine une grande distribution au peuple des millions que son contenu vaut. Leurs yeux brillent. Ils ont à nouveau l'impression de vivre intensément.
- Là. Dans le champ des Filloneau.
Ils ne savent même pas lequel des deux a parlé. D'ailleurs, ce n'était pas la peine de parler, c'était juste pour le plaisir de se dire quelque chose sous la lune. Pendant un long moment, Max avait été le rival de Dieu dans le coeur d'Aurore. Soeur Marie-Gabrielle prie toujours très intensément pour lui, chaque jour, avec un élan intact.
Elle se frotte les mains.
- Voilà. C'est eux qui trouveront un jour le coffre de Piaf, le coffre de Sarah...
Max hoche la tête.
- Peut-être le jeune Roger, le fils Fillonneau. Qui sait ?
Puis, il prend le bras de son ancienne compagne d'armes.
- Viens, Aurore, parlons un peu du camarade Jésus et de la guerre qu'il a faite avec nous, puisqu'il était déjà toujours à tes côtés. Et moi, je te parlerai de Frère Vladimir Illitch, un bon soldat, lui aussi...







Mahatma Bandit

Hum, j'espère que je n'ai rien bloqué, plus personne ne dit rien ^^
Mon idée de faire une rétro-extension dans le temps vient de la remarque de Florence, plus haut, qui nous invitait à ne pas oublier cette possibilité.

Voilà... dites quelque chose ^^

Super!

Désolée pour le temps d'attente mais je terminais mon stage -écriture ado aujourd'hui, et on a qu'une moitié de toit sur l'annexe et il pleut

C'est génial ce retour dans le temps, exactement ce que j'espérais. Ca donne de la profondeur de champ à l'histoire (héhé). Sans compter que les personnages brossés sont magnifiques. Bon, faudra s'y coller. Lise, n'est-ce pas ton tour???


- Bon, ben, ça va finir par faire un mini roman cette histoire.... Vous êtes magnifiques !

0 appréciations
Hors-ligne
Moi je trouve ce texte plein d'idées, d'imagination, avec l'apport d'une floppée (belgicisme?)de personnages, un retour dans le temps...Une connaissance historique, enfin bon! C'est un tremplin.
J'avais imaginé un coffre avec trois livres très anciens, reliés de la même façon, comme des incunables, mais l'un comportant des signes non lisibles par nous, l'autre des esquisses, dessins, le troisième avec des pages blanches "à l'encre sympathique" comme dans la chanson de Sheller que j'aime. Puis deux fioles contenant un liquide ambré et un liquide couleur bronze. Et une bourse fermée par une cordelette, contenant une clef. Ce qui nous conduisait plus loin, enfin dans deux ans , on aurait 2034 pages.Va pour Edith! C'est plus actuel, et c'est vrai qu'une de ses partitions ou un de ses objets cultes vaudra plus d'argent à Roger. En tout cas, le texte est super!

Derni?re modification le 19-04-2009 ? 17:38:34
Mahatma Bandit

Merci Flo, je croyais que j'avais jeté un froid (j'assume complètement mon côté anxieux, c'est aussi un moteur de vie et de non-apathie)

Oui et dans la profondeur du champ de chez Roger, se trouvait justement un coffre ^^

Je me demande s'il ne faudrait pas en faire quelque chose à la fin, de notre expérience. Oh, on gagnerait 3 centimes chacun, et encore, probablement rien du tout, mais ce n'est pas la question. Cette expérience me semble vraiment très intéressante, cette espèce de roman en volume, en perpétuelle dimension n+1... je trouverais dommage de le laisser à la fin s'effondrer et couler dans les bas de page 4356 du forum. Quand je vois ce que Lise a fait sur calameo.com, ça éveille en moi une envie de suivre cette piste..

Aussi, j'aimerais bien qu'Isa participe :bi:

Sinon, j'espère que tu étais du bon côté de la moitié du toit (au fait, superbe le poème de la jeune fille sur le cimetière, "des feuilles A4"... sacrée jardinière de talents que tu es !

0 appréciations
Hors-ligne
j'arrive, j'arrive... je viens de recopier et de lire - non, de lire d'abord, puis de recopier, de ranger, de mettre en Words - et de relire en même temps, vos MAGNIFIQUES TEXTES . et Mahamat, moi aussi je suis anxieuse, donc, on est deux. - j'admire le calme de Florence et de Christiane ô combien !!
oui, on va en faire quelque chose -
Bon, j'adore les retours dans le passé, donc, Maha, ton chapitre est très bien venu - puis, hé, ho !! ( interjection typiquement languedocienne ) quand quelque chose est BIEN ECRIT , je me REGALE .. voilà - je suis en train de lire "Irish Tweed" de Andrew M. Greeley, ( en anglais) vient de sortir - et j'adore il y a deux histoires en meme temps mais qui a la fin s'enchevêtrent - je me disais qu'après Manèges on pourrait essayer de faire la même chose - je vous expliquerai mon idée quand on aurait terminé et que nous aurons peut-être réussi à ouvrir le coffre /
Ne comptez pas sur moi pour l'ouvrir SEULE !!!
CC

0 appréciations
Hors-ligne
Merci pour vos gentils commentaires sur la publication Camaléo.. malheureusement, cama est instable, il y a un truc , je suis en train d'♪0tudier un autre, américain, et qui me semble meilleur en support e-livre.

Quelle merveille, ce web, quand on y pense ? !!
( je suis dans ma période d'enthousiasme profond !)

Deuxio ; JE COMMENCAIS A VOUS LANGUIR GRAVE
CC

0 appréciations
Hors-ligne
Bonjour à vous toutes, je suis nouvelle ici.
Je me suis inscrite car je voulais vous dire combien j'aime ce que vous écrivez, et tout particulièrement votre Tournez manège.....que j,ai eu le très grand plaisir de lire sur Calé. J'y avais laissé un commentaire (petit...) malheureusement, tout est disparu.

Bref très heureuse de vous retrouver ici, continuez, ce que vous faites est formidable.
Coucou CC Que de talents ici

0 appréciations
Hors-ligne
Bienvenue, et n'hésitez pas à poster l'un ou l'autre texte, (prose, poésie, réflexion) ou commentaire.

Ah sur Calaméo, cela sera certainement mis à jour avec les nouvelles participations. j'ai retrouvé votre message :

http://fr.calameo.com/accounts/38176
Mahatma Bandit


0 appréciations
Hors-ligne
Il y a une suite .. voir Tournez maneges Suite
CC


Vous ne disposez pas des permissions nécessaires pour répondre à un sujet de la catégorie Ecriture libre.

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 81 autres membres