Évolunes, 5 - Au bout du dernier mètre de terre

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Hors-ligne
Cueille le jour
parce que tu es le jour

(Ricardo Reis/Fernando Pessoa)

Ao Longue o mar, par Madredeus, au chant Beatriz Nunes :



Évolunes
5. Au bout du dernier mètre de terre


Au bord d'un petit pays qui en avait conquis un grand
au flanc gauche du soleil
face au côté plus humide du feu
éventée par la queue d'une sirène au goût d'anchois
la lune s'est levée plus près d'ici qu'à l'habitude

la mer marchait vers nous d'un bon pas
nos mains en coupe se tendaient vers l'ouest
mais pas les tiennes
tu étais occupée à tenir en équilibre les hommes du village
de chaque côté de leur cœur
tes mains posées du même poids
balance habitée par le rêve oscillant de tous ceux qui regardent la mer
rester ou partir
ici ou là-bas
moi ou moi
il suffisait de marcher

il n'y avait pas de falaise
la plage était de plain-pied il suffisait de marcher
les peu nombreux qui se retournaient encore vers la terre
distinguaient les mille nuances de la longue lande
et plus loin encore
au-delà du village
tout un peuple d'animaux que plus personne ne chassait
et qui semblaient avoir eux-mêmes cessé de manger depuis plusieurs jours

il suffisait de marcher et pourtant
un seul pas de plus eût été un saut
un plongeon d'autant plus effrayant qu'il serait invisible
il suffisait de marcher mais pour l'heure c'était toi qui venais vers nous
tu nous caressais l'un après l'autre de tes seuls cheveux
tantôt délaçant et ôtant les chaussures qui nous retenaient
tantôt poussant de tes bras les dernières maisons du continent

qu'elles ne prennent pas le large à leur tour
quand la nuit tomberait tout à fait

et le moment est arrivé

démesurée
la lune est devenue si insupportablement belle
qu'elle a doucement soulevé la mer plus que de raison

à cet instant
même toi tu as lâché prise
tu as chanté malgré toi
et des lucioles sont sorties par ta bouche


Dernière modification le jeudi 26 Janvier 2017 à 14:29:44
Remercie pour la lumière du jour
pour ta vie et ta force
-Tecumseh, chef Shawnee


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Avatar : Déesse Epona, bois de chêne, alliage cuivreux, tôle d'argent et pâte de verre, Ier-IIème siècle, Saint Valérien, Bourgogne (actuelle Yonne)
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